Ou quand la tactique bat la vitesse , et que la Méditerranée récompense les marins à l’ancienne.
Ils n’étaient pas favoris. Pas les plus rapides, ni les plus visibles. Et pourtant, Le Lupin (propriétaire Thibault Haudos de Possesse, YCF, Skipper Jean Rameil, YCF) ce valeureux IRC3 basé au Club Nautique de la marine à Toulon (CNMT), vient d’écrire une belle page de cette Giraglia 2025. Face à une flotte truffée de machines de guerre en carbone jusqu’au mât voire aux toilettes, pilotées par des équipages professionnels, le Lupin et ses sept marins passionnés ont démontré qu’un bon « vieux » bateau non typé IRC, mené avec intelligence et courage, peut renverser les pronostics.
Une course pleine de contrastes, comme la Méditerranée les aime.
Démarrée dans un calme plat presque cruel, cette édition aura joué sur les nerfs. Le Lupin, comme souvent, a brillé dans le petit temps, se faufilant avec patience et science là où d’autres restaient scotchés sur place. Une anecdote savoureuse circule déjà : au large, l’équipage a eu le luxe — ou l’ironie — de piquer une tête dans la mer d’huile, transformant la pétole en baignade ludique ou défi devant Eole qui tarde à souffler – Sans doute les deux.
Mais la suite a tout changé. La brise s’est levée et dans ce chaos élégant, le Lupin est resté stoïque, équilibré, d’une précision quasi chirurgicale dans ses choix de trajectoires et de voiles.
De six milles derrière à la victoire…
Et puis, le coup de théâtre. À quelques encablures de la mythique Giraglia, Le Lupin pointe à 6 milles nautiques du leader Flying Dolphin (Dufour 40 GTE mât carbone à qui Le Lupin rend paradoxalement du temps). La place de 1er semble s’éloigner. Mais le flair du tacticien qui a analysé les différents routages pour en retour proposer une nouvelle stratégie jusqu’à Gènes va changer la donne. Le Lupin tente un bord osé, en allongeant la route dans les petits airs pour contourner une bulle sans vent que notre adversaire direct n’a pas su éviter. Le Lupin avance , silencieux. Et au moment du verdict… il rafle la 1ère place de 17 mn en temps compensé à Flying Dolphin pourtant plus rapide surtout avec son code 0 et termine 17e au classement général IRC, n’ayant devant lui que des adversaires plus modernes plus gros plus puissants et plus rapides.
Pour la petite histoire le S1 (spi symétrique léger) longuement utilisé dans cette Giraglia date de 2007 et le J1 (Génois léger) de 2012. Il finiront d’ailleurs tous les deux au reclassement des voiles en sacs nautiques et autres articles marins.
Mais l’équipage du Lupin ne s’est pas seulement illustré sur le large.
En régates côtières, il a également brillé, terminant 2e en Inshore, juste derrière le redouté Flying Dolphin. Ce Dauphin Volant qui a été un adversaire redoutable tout au long de la regate au large.
L’âme du Club Nautique de la marine à Toulon est à l’honneur et celle du YCF également.
Le Lupin, c’est aussi un esprit, un port d’attache, une famille : le Club Nautique de la marine à Toulon. C’est là que réside le bateau, c’est là qu’il est bichonné, aimé, préparé. Et c’est là que s’est forgée l’alchimie entre Jean, son fils Trevor, et leur équipage fidèle : Christophe, Renan, Nico, Laurent, Anne Pierre et Mickael. Ensemble, ils incarnent la voile telle qu’on l’aime : humaine, technique, mais profondément collective.
Le mot du skipper :
« La mer, ce n’est pas un circuit. Elle aime ceux qui la respectent, qui l’écoutent. Et ça, au CNMT comme au YCF , on l’apprend dès le plus jeune âge . »
Le Lupin , ce petit voilier à l’âme bien trempée, nous rappelle une vérité simple mais trop souvent oubliée : ce ne sont pas toujours les plus puissants qui gagnent, mais ceux qui naviguent avec intelligence, patience… et avec cœur.